12 June 2020

11 min - lecture

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Les femmes d'Ubisoft – Claire Rieuneau

En tant que coordinatrice du développement au sein de la division parisienne d'Ubisoft Film et Télévision, Claire Rieuneau chapeaute les projets actuels du studio et trouve des idées pour de nouveaux projets potentiels. Son travail demande à la fois de la créativité et de l'organisation. De la créativité, car sans son propre apport créatif et celui de son équipe, les émissions pourraient ne jamais voir le jour. De l'organisation, car sans les bons arguments, son équipe et elle-même ne parviendraient pas à convaincre les réseaux de diffusion ainsi que les services de diffusion en continu de diffuser ces programmes auprès du grand public. Nous nous sommes entretenus avec Claire Rieuneau afin d'en apprendre davantage sur sa carrière, sur ses projets à venir, et sur la manière dont les femmes issues du secteur de l'animation l'ont inspirée.

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Parlez-moi un peu de votre parcours.

Claire Rieuneau : Je suis née non loin de Paris, mais ma famille a déménagé en Normandie l'année de mes 12 ans. J'ai toujours été de nature curieuse et aime apprendre de nouvelles choses. Je voulais faire tellement d'activités lorsque j'étais jeune, mais la musique m'attirait tout particulièrement, et je me voyais bien travailler dans ce domaine. J'ai joué de l'alto dans une école de musique pendant environ 10 ans, et pendant toute une période, je me suis dit que je pourrais en faire mon métier. Après le lycée, j'ai envisagé d'entrer dans une école d'art, mais j'ai finalement décidé de me rendre en Allemagne, où j'ai suivi des cours de production musicale. J'étais convaincue que quoi que je fasse, je serais heureuse tant que mon activité serait liée à la musique et à l'art. Finalement, j'ai compris que je devais faire le deuil d'une carrière dans la musique. C'était une véritable passion pour moi, mais je ne pouvais pas en faire mon métier, car j'avais peur de ne plus y prendre autant de plaisir. J'avais justement commencé à y perdre goût à l'école de musique.

J'ai également envisagé une carrière de journaliste musical pendant un temps, puis j'ai découvert la production. En tant que producteur, vous avez un pied dans la musique, mais restez dans l'ombre. J'adorais l'idée de pouvoir toucher à différents aspects du secteur. Petit à petit, sans savoir réellement comment j'en suis arrivée là, je me suis éloigné de la musique pour me rapprocher de l'industrie cinématographique. J'ai décidé de revenir en France pour étudier le marketing, car il s'agit d'un élément essentiel, quel que soit le secteur dans lequel vous travaillez. Je voulais également être en mesure de remettre un pied dans la musique, au besoin. Au cours de ma dernière année d'étude, je me suis spécialisée dans la production cinématographique.

Une fois mon diplôme en poche, j'ai eu envie de travailler pour Ubisoft, car j'ai toujours joué aux jeux vidéo, et Assassin’s Creed était l'une de mes séries préférées. Toutefois, je ne savais pas comment m'y prendre pour rejoindre cette entreprise, car Ubisoft ne rimait pas nécessairement avec film. Du moins, c'est ce que je pensais jusqu'à ce que je découvre Ubisoft Film et Télévision. J'ai directement su que je devais saisir cette occasion. J'ai décroché un stage au sein du studio et y travaille depuis maintenant cinq ans.

Qu'est-ce qui vous a poussé à quitter le monde de la musique et à vous tourner vers le cinéma et la télévision?

CR: Je pense que je n'avais jamais pris le temps de m'intéresser à cette industrie. Mes parents n'étaient pas du genre à aller au cinéma, et ce n'est que lorsque j'ai commencé à regarder des films de mon côté que je me suis rendu compte que j'appréciais ce médium. Il en va de même pour la télévision. Je ne suis pas une adepte des comédies de situation, et la télévision proposait beaucoup ce genre d'émissions à l'époque. Mais de nos jours, l'offre s'est grandement diversifiée. J'ai ensuite découvert le rôle de producteur de films, que je trouve extrêmement intéressant, peut-être même plus que celui de producteur de musique.

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Comment avez-vous obtenu le rôle que vous occupez aujourd'hui?

CR: À mes débuts chez Ubisoft Film et Télévision à Paris, j'occupais le rôle d'administratrice de production. Nous ne disposions pas encore d'une division de développement. Au terme de mon stage, mon responsable m'a informée que son équipe et lui mettaient justement sur pied une division de développement, et qu'ils comptaient créer un rôle sur mesure pour moi afin que je puisse rester dans l'entreprise. Bien que j'ai été chanceuse, car cela est arrivé au moment opportun, j'avais déjà exprimé mon intérêt pour le développement, qui est à la base de n'importe quel projet télévisuel et cinématographique.

Au sein du bureau parisien, nous travaillons principalement sur des projets d'animation, et la plupart de nos projets concernent des séries télévisées. Toutefois, je peux désormais travailler à la fois pour la télévision et le cinéma. C'est notamment dû au fait que de nos jours, il n'y a plus de réelle différence entre les deux sur le plan de la production. Je pense même que les séries télévisées permettent de développer davantage l'écriture et les personnages, et sont un excellent moyen de raconter des histoires marquantes.

Vous avez évoqué votre peur de travailler dans le monde de la musique, car vous pensiez que vous risquiez d'y perdre goût. Voyez-vous le cinéma et la télévision sous un autre jour depuis que vous travaillez dans cette industrie?

CR: Cela m'a permis de découvrir et d'apprécier davantage cette industrie. Je suis contente de m'être tournée vers le cinéma et la télévision. J'apprends chaque jour de nouvelles choses, les projets affluent, tous différents les uns des autres, et je travaille sur différents types de production. Aucune journée ne se ressemble, et je suis bien ici.

Que fait une coordinatrice de développement exactement?

CR: Nous essayons d'étendre l'univers des propriétés d'Ubisoft tout en créant des idées originales au sein de l'environnement vidéoludique, ou en accord avec la philosophie d'Ubisoft. Nous recherchons constamment de nouvelles idées qui ont du sens pour Ubisoft.

Au quotidien, un coordinateur de projets assure le suivi de tous les projets en cours de développement. Dans le cadre du développement de nouveaux projets, nous commençons généralement par regarder s'il est possible de raconter une histoire unique au sein de l'univers de l'un des jeux produits par Ubisoft. Il ne s'agit pas de reprendre telle quelle une histoire déjà racontée dans le jeu. Il s'agit plutôt de voir ce qu'un autre type de média peut apporter à une franchise. Nous devons également trouver les bons profils afin de nous aider à concrétiser notre vision. Puisque le bureau parisien se concentre principalement sur l'animation, nous recherchons avant tout des auteurs, des artistes et des concepteurs.

Une fois que nous avons trouvé une idée à développer ainsi que les profils potentiels adéquats, nous la soumettons à notre patron, Gérard Guillemot. Si elle est acceptée, nous pouvons passer à la phase de développement. Nous devons ensuite approcher des sociétés de diffusion et des services de diffusion en continu pour tenter de leur vendre le projet. Il s'agit réellement d'un métier très varié, et je ne m'ennuie jamais.

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Y a-t-il un aspect que vous préférez dans votre travail?

CR: J'aime tout particulièrement tout ce qui a trait à la partie créative. Ce qui m'intéresse le plus, c'est la création : l'écriture, les conceptions… Cela dit, le côté commercial n'est pas pour me déplaire non plus. J'aime lorsqu'un art trouve son public, et cette facette de mon métier consiste justement à rendre cela possible. Créer des choses merveilleuses n'a finalement que peu d'intérêt si vous ne pouvez pas les partager avec d'autres personnes.

Estimez-vous que votre expérience en tant que joueuse est un plus dans votre travail?

CR: Oui, c'est un plus, mais cela ne fait certainement pas tout. Dans le monde du développement, vous devez faire preuve de curiosité et vous intéresser à de nombreuses choses, pas seulement aux jeux vidéo. Il s'agit en revanche d'un réel plus pour rester fidèle au matériel de base et être certain que l'oeuvre plaira à un public de joueurs. Étant moi-même une joueuse, je trouverais dommage qu'une série télévisée inspirée d'un jeu que j'apprécie trahisse le matériel d'origine.

Adapter un jeu vidéo en une série télévisée est-il différent d'une adaptation en film?

CR: En fin de compte, le défi est le même : l'écriture des personnages et de l'histoire doit être de qualité. Je pense que pendant longtemps, Hollywood ne parvenait pas à proposer de bonnes adaptations de jeux vidéo, car les réalisateurs tentaient d'adapter le plus fidèlement possible les histoires des jeux vidéo sur le grand écran. Un jeu peut durer 30, 60, 100 heures. Penser que vous pouvez condenser tout cela dans un film de deux heures est illusoire. Les films doivent également plaire à un public plus large qui n'est pas nécessairement composé exclusivement de joueurs. Il y a une différence entre s'inspirer d'un jeu et tenter de le restituer le plus fidèlement possible. Les réalisateurs commencent à le comprendre. Je pense que l'adaptation d'un jeu vidéo en une série télévisée est un peu plus facile, car vous avez plus de temps pour développer l'histoire et l'univers. Peut-être verrons-nous à l'avenir davantage d'adaptations en séries télévisées.

Pouvez-vous citer un exemple d'une série animée qui vous inspire?

CR: En animation, j'ai récemment découvert la nouvelle série « She-Ra » sur Netflix. La première saison était plutôt chouette, mais ce sont les saisons suivantes qui m'ont particulièrement séduite. La série est vraiment rafraîchissante dans la manière dont elle développe ses personnages et les relations qui les lient. Cela va bien plus loin que ce qui se fait généralement dans les séries pour enfants, et j'aimerais également mettre cet aspect en avant dans mes futurs projets chez Ubisoft.

En parlant de votre futur chez Ubisoft, quel est votre objectif de carrière ultime?

CR: Je souhaite devenir une productrice accomplie. Bien plus qu'une développeuse de projets, je souhaite maîtriser tous les aspects du métier de producteur. J'aimerais créer mon propre projet et en être responsable de A à Z. J'aimerais également continuer de travailler à l'échelle internationale, sans me limiter à un marché en particulier. J'aime imaginer des histoires, des univers… et j'essaye de mettre tout cela sur papier, mais je ne suis pas une autrice, du moins pas encore.

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Vous avez mentionné la série « She-Ra ». Pensez-vous qu'il existe un mouvement en faveur d'un plus grand nombre de séries animées avec des personnages principaux féminins?

CR: Oui, très clairement. « Legend of Korra » illustre bien ce mouvement; elle a été en quelque sorte l'une des premières séries animées à introduire un personnage principal féminin. Je pense que c'est en partie dû à la présence accrue d'autrices dans ce secteur. Prenez par exemple la série « Steven Universe », qui a été écrite par Rebecca Sugar. Elle a été conceptrice pendant un temps, mais possède désormais sa propre série et peut exprimer ses propres idées. C'est également le cas de la série « She-Ra », qui a été écrite par Noelle Stevenson. Je pense que nous verrons de plus en plus de personnages féminins forts à mesure que nous laissons les femmes s'exprimer en tant que réalisatrices, autrices et productrices. Je ne suis pas en train de dire qu'il faut obligatoirement un plus grand nombre de personnages principaux féminins, mais il est selon moi nécessaire de voir davantage de personnages féminins forts. Ils ont les mêmes droits que les personnages masculins. « Steven Universe » est là encore un bon exemple : le héros s'appelle Steven, mais il est entouré d'un grand nombre de personnages féminins forts et bien écrits.

Ce mouvement ne se limite d'ailleurs pas au secteur de l'animation. Cette tendance s'observe également dans les livres, les films classiques et ceux en prises de vues réelles. Puisque de plus en plus de femmes travaillent dans les studios de production, il est probable que nous verrons désormais davantage de bons personnages féminins, et plus uniquement des stéréotypes.

Auriez-vous des conseils à donner aux jeunes femmes qui souhaitent se lancer dans une carrière similaire à la vôtre?

CR: Ne baissez jamais les bras, saisissez toutes les occasions qui se présentent à vous. Vous en tirerez chaque fois des leçons. Il n'y a pas une bonne et une mauvaise façon de faire. Nous faisons tous de notre mieux. Toutes les expériences sont bonnes à prendre et ont quelque chose à vous apporter. N'ayez jamais peur d'essayer de nouvelles choses, mais aussi de demander de l'aide ou ce dont vous avez besoin. Le pire qui puisse vous arrivez, c'est d'essuyer un refus, alors n'hésitez pas à vous lancer.

Pour lire d'autres entrevues comme celle-ci, consultez les portraits précédents de la série « Les femmes d'Ubisoft ».

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